Si ces dernières années d’importants efforts ont été réalisés dans le domaine de l’impression, des substances toxiques restent encore en quantité non négligeable dans certains produits. C’est ce que révèle une récente enquête de l’AIPALS auprès d’une vingtaine d’entreprises adhérentes.
Plus de ¾ des imprimeries utilisent désormais des encres qui ne sont pas classées dangereuses pour la santé.
Peut-on pour autant dire que les substances CMR (cancérigènes, mutagènes et reprotoxiques) ont disparu des ateliers ? Non, car l’étude que vient de réaliser l’AIPALS montre qu’elles sont encore bien présentes dans les produits dit «annexes» : vernis, nettoyants, diluants, additifs, solution de mouillage, etc.
Dans 32% des cas, une toxicité a été relevée par le conseiller en risque chimique en charge de réaliser l’enquête.
« Les imprimeurs voulaient savoir si leurs efforts étaient suffisants. Or il n’existait pas d’étude récente, et encore moins locale, sur le sujet », explique Aymeric Marty. La dernière analyse sur le sujet remonte à celle de l’INRS(*) en… 2008.
Outre la présence de CMR, l’enquête de l’AIPALS conclut à une utilisation encore trop importante (74%) de produits à base de composés organiques volatils (COV) qui peuvent entraîner à plus ou moins long terme des problèmes sur la santé, dont certains irréversibles. Il s’agit notamment des alcools (isopropylique, méthanol), des solvants pétroliers (solvants naphta, cyclohexane), de cétones et des éthers de glycol.
Une bonne ventilation
Par ailleurs, l’étude révèle la présence de pics de pollution à certains moments de l’activité, notamment au nettoyage des machines, mais aussi une pollution « de fond » qui témoigne d’une absence de renouvellement de l’air ambiant.
Ceci reste problématique puisque, si l’exposition des salariés est moins élevée, elle n’en reste pas moins constante tout au long de la journée de travail…
Pour continuer à diminuer la dangerosité de cet environnement, la première des préconisations est de miser sur la prévention collective plutôt qu’individuelle (type équipements de protection individuelle : masque, gants, etc).
L’idéal est de disposer d’une ventilation mécanique générale et d’un système de captage à la source des polluants, qui permettent de baisser le niveau de pollution de manière significative. 43% des entreprises visitées en possèdent. Pour les autres – qui ne peuvent pas pour des raisons de coût ou de contraintes techniques des lieux -, la pollution globale peut diminuer par des gestes simples comme l’ouverture des fenêtres, des portes et des portails, lorsque l’activité le permet.
«Notre nouveau système de climatisation, pour lequel nous avons investi 150 000€, permet de renouveler l’air deux fois plus souvent qu’auparavant», raconte Romain Rouzaud, le coordinateur sécurité, environnement et hygiène d’E-Factory (ex-Pure Impression), une imprimerie de 140 salariés à Mauguio.
«On a aussi supprimé toutes les substances CMR sur notre site ainsi que l’alcool isopropylique de notre eau de mouillage car il émettait des vapeurs nocives.»
L’entreprise travaille main dans la main avec l’AIPALS sur les études de postes, l’organisation d’ateliers de sensibilisation et le choix de certains produits.
Des gestes simples
« Juste bien fermer la poubelle à déchets peut avoir un impact énorme pour baisser la
pollution. »
« Choisir le produit le moins dangereux est l’un des premiers principes à respecter car on élimine ainsi le danger à la source. Il y aussi tout un tas de petits gestes qui n’entraînent pas de surcoût pour l’entreprise mais qui baissent considérablement la pollution », poursuit le conseiller en risque chimique de l’AIPALS.
« Il suffit parfois juste de penser à bien fermer une poubelle qui contient des déchets souillés. Quand je suis passé faire des mesures dans les entreprises, j’ai pu noter des pics parce qu’un simple bac contenant des chiffons était resté grand ouvert ou qu’un pot de produit n’était pas fermé. Cela n’a l’air de rien, mais l’impact est énorme et juste y penser peut changer beaucoup de choses. »
Cela passe souvent par des rappels aux salariés et des formations adéquates. L’AIPALS a ainsi édité des fiches de postes « conducteur offset » et
« sérigraphe » avec des consignes pour mieux protéger leur santé. « Les salariés prennent des habitudes et avec le temps, il y a des choses auxquelles ils ne font plus attention, c’est normal », avoue Pierre-François Canet, le président de l’AIPALS qui est éditeur-imprimeur (Les Petits Affiches à Montpellier). « C’est pourquoi il est important de faire intervenir son service de santé au travail sur le lieu de l’entreprise. La parole de professionnels extérieurs est souvent mieux entendue. Pour ma part, j’ai vu une différence entre avant et après le passage d’Aymeric Marty. »
« Les salariés prennent parfois de mauvaises habitudes. Une piqûre de rappel est toujours la bienvenue. »
Dernier rempart : les EPI. Mais là encore, attention, l’étude de l’AIPALS révèle que 57% des imprimeries ne disposaient pas des équipements de protection individuelle adaptés à l’activité.
25% des entreprises emploient encore des encres contenant des CMR
32% des entreprises utilisent des produits annexes contenant des CMR
74% utilisent des produits annexes contenant des solvants
67% des salariés sont soumis à des pics de pollution, notamment lors des nettoyages (manuel, automatique) et du stockage des déchets souillés.